L'Ennui
Madeleine 2007
Billets de La Provence
Grenelle
S comme Suerte
Abregeons!
L’ENNUI
« Tu le connais, lecteur, ce
monstre délicat » Ch. Baudelaire.
La
réflexion qui semble s’engager à Mont de Marsan, dans certains secteurs de
l’aficion, au sujet d’un double abonnement toriste/toreriste pour les
prochaines fêtes de
Economiquement, on devrait pouvoir remplir les arènes
jusqu’au drapeaux pour peu que l’on compose avec les super-vedettes sur le
choix et la présentation des toros, des chefs de lidia, des compagnons de
cartel. LLeno assuré et récompensé par une pluie d’oreilles qui transforment
ces après-midi de postin en tardes p’a el
recuerdo dans lesquelles le moindre toro tenant sur ses pattes et
désespérant de candeur est honoré d’une vuelta, le toro invalide
« inventé » par un poignet d’une insupportable douceur. L’on sort de
là certain d’avoir participé à l’histoire en train de se faire, l’âme repue
d’esthétisme souvent bon marché, la conscience pourtant (pour certains)
vaguement troublée de n’avoir vu qu’un tiers du spectacle proposé.
Une fois les caisses bien remplie, l’organisation se
penchera sur ce qui fait le sérieux d’une place c'est-à-dire la confection de
carteles dans lesquels le toro aura (devra avoir) une place plus importante.
Toreros de second plan vont alors côtoyer des toros de respect. Le
public, moins nombreux et plus exigeant viendra voir un premier tiers
respecté par les professionnels, une lidia adaptée au comportement du toro, des
estocades « en toda ley etc … enfin tout ce qui rend la tauromachie
crédible et défendable.
Las ! Autant le public toreriste a souvent
des raisons de quitter les arènes ravi, autant les toristes froissent très
souvent leur billet au sortir de tardes où « principal acteur de la
feria » n’a pas du tout tenu ses promesses. L’estampe sortie du toril
verra son ambition rapidement brisée au mieux sous la première pique, et c’est,
distrait et parado, ne consentant à bouger au prix de multiples sollicitations,
qu’il achèvera sa vie publique sous les exhortations impuissantes des toreros
et les soupirs des aficionados.
Car il faut le dire, on s’ENNUIE grave par les temps
qui courent (et la langue bleue n’est pas la seule responsable) avec les
élevages de respect. Sur les doigts d’une main se comptent les élevages des
trois pays voisins capables se susciter enthousiasme (élevages livrant
des toros limpios s’entend) ! La meilleure volonté d’un torero (et ils en
ont la plupart !) ne peut rien face à un toro figé, face à un toro sans
caste.
Ce qui fait briller les yeux des aficionados a los
toros ce sont des toros à charge répétitive dont la caste vive les poussent à
charger le cheval sans coup de tête, à s’engouffrer dans la muleta, à
poursuivre les banderilleros, à mourir au centre du ruedo. Une tauromachie qui
n’est pas certes de tout repos mais qui procure une émotion unique. Celle d’un
art unique.
Faire venir aux arènes les jours de corrida toristes
un public plus nombreux demande de choisir des élevages qui respectent bien sur
l’intégrité physique du toro mais aussi qui donnent certaines garanties dans le
comportement durant la lidia ! Ces bases jetées, l’improbable alchimie de
l’art de Cùchares peut aboutir à des succès bien plus importants que les
spectacles formatés pour triomphes garantis Dans ce monde bipolaire qu’est
l’aficion a los toros, la voie moyenne est certainement la plus proche d’une
tauromachie moderne, crédible et défendable.
Elle est la plus difficile à trouver pour les
ganaderos qui doivent faire coexister caste vive, mobilité et noblesse. Elle
est la plus exigeante pour les toreros qui ont à supporter (aguantar !)
des charges répétitives.
Dans le débat qui agite l’aficion montoise et qui
devrait agiter toute l’aficion, le problème n’est pas de remplir les caisses,
on connaît la formule, mais bien de hisser la corrida de toros à un
niveau où le toro seul garantie l’intérêt que l’on porte à la course.
Michel MIALET.
S comme « SUERTE »
Mot
aux sens multiples.
En tauromachie, toute
action, à toutes les phases du combat, est « suerte » : suerte
de varas, suerte de banderilles, suerte
suprême ou de matar… Le mot
traduit aussi l’intention avant l’action (mise en suerte) et la façon de conduire l’action (entrer en suerte, charger la suerte, sortir de suerte).
Il recouvre également la notion de localisation et de direction : toro s’arrêtant en suerte, suerte naturelle
ou contraire en fonction des terrains…
Suerte reprend son sens général de « chance » ou de
« sort », quand les toreros prononcent,
à l’orée du paseíllo, la phrase
rituelle : « Que Dios reparta
suerte ! ».
Est-ce
à dire que le Castillan est une langue pauvre au point de regrouper sous ce
seul terme autant de significations qui nécessitent de nombreux mots
français ?
Il est plus élégant de penser que les diverses
facettes de ce mot ne font que recouvrir son sens profond : qu’aucun geste
taurin n’est anodin, et que Dieu et ses Saints prennent la garde avec les
chirurgiens des arènes, tout au long de la lidia.
A la demande de
Vous avez dit critères ?
Le plaisir et le souvenir n'ont que faire de
comptabilité. Un contre-exemple parmi d'autres: le grand César Rincon n’a coupé
qu’une oreille à l’immense Bastonito (à Madrid), qui s’est contenté d’une
vuelta. Ces deux là ont pourtant marqué l’histoire. Quelques vœux pieux en
guise de conseil :
- Toujours juger en
fonction du toro (une faena d'infirmier alluré ne peut valoir plus qu'une lidia
rude mais complète)
- Un toro très
noble mais transparent à la pique ne peut prétendre à la vuelta et l’exceptionnel
d’un indulto ne peut se justifier que par 3 ou 4 grandes piques
- La façon de
porter l'estocade (court et droit) est plus importante que sa rapidité d'action
- Seul le mouchoir
exprime clairement l’opinion: blanc pour les oreilles, bleu pour la vuelta ,
orange pour l’indulto et vert pour le changement de toro
- La deuxième
oreille appartient au Président
- Les saluts,
ovations et vueltas sont des intermédiaires pour graduer la récompense
Bonne tarde de toros, avec ou sans pluie d’oreilles.
Marc GÉRISE.
Le tercio de pique(s):
- L’animal pousse,
le cavalier lui ferme la sortie, appuie la pique, la vrille puis pompe. Le
maestro fait mine d’ordonner (le piquero est à ses ordres) de stopper mais le
picador n’entend pas. Finalement, il arrête. Le toro sort du peto, fléchit :
la pique (qui en vaut trois ou quatre) a fait des lésions dans son dos !
Le piquero sort sous les huées du public.
- L’animal
s’emploie peu, le picador lève la pique puis l’enlève. Le maestro demande le
changement de tercio. La piquero sort sous les applaudissements alors qu’il n’a
pas piqué !
Deux exemples de monopiques ordinaires sans émotion,
juste un gain de temps pour passer le plus vite possible à la muleta.
Le piquero entre en piste et se place face au toril.
Le cheval fait front au toro. La pique est placée dans le murillo, le cornu
pousse collé au peto. Le quite est rapide. L’animal replacé un peu plus loin,
s’élance avec allant pour la deuxième pique. La puya correctement placée
et non exagérée permet à l’animal de se grandir sous le fer. Le toro tarde à
sortir au quite. Placé au centre, il partira une troisième fois avec
allégresse. La poussée est énorme. Aucune carioca, vrille, ou autre pompage, le
picador a permis au toro de montrer toute sa grandeur. Le public, debout,
ovationne la sortie du cavalier ! Grand moment d’émotion…ou quand le toro
reprend la place qui est la sienne…
Olivier
BARBIER.
Géométrie de la bravoure
Cette
qualité spécifique du taureau de combat se juge lors du tercio de piques, seul
moment où s’établit un contact direct, sans leurre, et où le taureau, certes
châtié, a en revanche « quelque chose à se mettre sous la corne ».
Dès 1908 est apparue l’idée de structurer l’espace, en
matérialisant le terrain dévolu au picador par une raie tracée parallèlement à
la barrière. En
En fait toute la circonférence de ces raies
concentriques n’est pas utilisée, car, pour exprimer pleinement sa bravoure, le
taureau doit être piqué à distance de la querencia naturelle du toril. Le tracé
de la corrida-concours est mieux adapté : 3 lignes parallèles sont
dessinées à l’opposé du toril, de façon à placer le taureau de plus en plus
loin du cheval, pique après pique. Généraliser un tel tracé pour toutes les
corridas pourrait être un moyen de revaloriser ces piques tant contestées et
pourtant si nécessaires.
Utopie, hélas, au moment où le «service minimum» de la
mono-pique entre inexorablement dans les habitudes.
Robert
RÉGAL.
La corrida concours : une corrida comme une autre
Etrangement le public de cette course se sent investi
d’une passion soudaine pour les toros, le premier tiers et les picadors. Le
toro n’est plus un simple faire valoir pour torero donneur de passes sans
profondeur ni engagement. Le toro est roi de la piste, il porte les couleurs de
son élevage, son histoire, 5 années de soins intenses et 10 ans de sélection
sur son dos.
Enfin les toreros mettent les toros en valeur. Ils les
placent à la bonne distance face au cheval, de plus en plus loin à chaque pique
(comme le stipule le règlement). Les toros expriment enfin leur force et leur
bravoure. Les châtiments sont dosés, les picadors retrouvent leurs lustres
d’antan ; celui ou leurs noms s’inscrivaient en haut de l’affiche au
dessus des toreros. Les subalternes sont à l’unisson de leurs maestros. Les
passes de cape sont données avec parcimonie et précision (comme le stipule le
règlement). La préparation du toro (la lidia) pour le 3ème tiers retrouve ses
droits (comme le stipule le règlement). La présidence redevient l’ultime
décideur (comme le stipule le règlement) et plus un simple agitateur de
mouchoir aux ordres des toreros.
Pourquoi la corrida concours respecte-t-elle
scrupuleusement le règlement taurin ? Les «corridas» de tous les jours ne
seraient-t-elles pas l’antithèse de la corrida ?
Laurent GINER.
Cette
année fut particulière pour les encartés montois qui ont participé à la
commission taurine extra municipale, aussi le compte rendu sera différent avec
une partie qui concernera l’adhérent andaïste du moun et une partie le membre
de la commission, sans oublier bien sûr de rajouter les attentes pour la féria
suivante.
Les toros d’Adélaïda Rodriguez avait été plébiscité
par tous les membres de la commission et je crois que le lot, bien présenté, a
donné du jeu et pris ses 12 piques réglementaires sans sourciller, montrant de
la noblesse et permis à Fernando Cruz de faire des naturelles mains basses
d’une grande pureté, chose que le madrilène a peu eu l’occasion de faire durant
sa temporada. On peut malgré tout regretter une certaine faiblesse dans le
dernier tiers, vu la qualité des frères passés à Bayonne, on peut se dire qu’en
s’y prenant plus tôt, on aurait pu avoir un lot plus performant.
Quant aux Coquillas, la décision de faire venir ces
« petits novillos », fortement encouragée par Benoît Piarrine de
« l’escalier 6 » a été à la hauteur des espérances tant sur le
comportement à la pique, car ils ont assumé eux aussi leur douze rencontres au
cheval, voire un peu plus, que sur le comportement à la muleta en donnant
beaucoup de fil à retordre aux 3 jeunes dont seul Pepe Moral a semblé en mesure
de résister aux assauts des bêtes et d’avoir l’étoffe d’un futur toréro.
Les Meynadiers sont sortis bien présentés, certains
diront trop bien, par rapport aux jeunes apprentis, avec en plus du mordant a
la muleta permettant aux jeunes de montrer un certain savoir faire et de se
mettre en confiance.
Je regrette une chose mais importante dans le premier
tiers c’est la mauvaise volonté des toréros à mettre le toro en suerte aux
piques, l’incompétence de nombreux peones incapables de placer le toro et de
défendre le cheval, pensant d’avantage à se protéger. Sur les soixante douze
rencontres j’ai dénombré à peine une vingtaine de véritables mises en suerte
correctes.
Pourquoi ce désastre sur les courses de vedettes en
général ?
Les éleveurs veulent que leurs toros soient lidiées
par les stars donc ils cherchent à rendre le bétail plus facile à combattre en
faisant des « essais » d’origines différentes et à force de mélanger
on perd le sang, la caste enfin tout.
Les toréros vedettes avec leur garde rapprochée,
veedor, empresa, ne souhaitent pas toréer tel ou tel élevage par manque de
garanties mais lesquelles ? Pas celles qui vont permettre un duel
authentique, non celles qui vont permettre de s’en mettre pleins les poches
sans prendre de risques démesurés, surtout dans les placitas de second rang où
le public se pâme devant eux se souciant peu de celui qui est habillé de noir
pourvu que l’on voit des passes et encore des passes. Alors vous pensez bien pauvres
aficionados « a los toros » qu’une petite féria comme Mont de Marsan
ne pèse pas lourd face aux paquets de contrats déjà signés.
N’oublions pas non plus que les gérants d’arène sont
là pour rentabiliser et donc gagner de l’argent qu’ils soient Espagnols ou
Français et donc laisse tomber l’AFICION pour l’appât du gain.
Le public est en train de se « déséduquer »
perdant les valeurs fondamentales de la tauromachie, le respect du toro, le
duel entre la bête et l’homme, la lidia et ses principes. Mais nous en
reparlerons plus loin dans ce compte rendu….
Compte rendu n°2
1. La cuadra de
caballos de M. Alain Bonijol a fait l’unanimité pour la qualité des chevaux, le
respect des monosabios et leurs compétences, la tenue en piste avec un quite
magistral de Alain Bonijol pour défendre son cheval après la chute du picador
durant la novillada piquée. Voilà un homme discret et sérieux qui connait bien
son monde et qui est capable d’aider les organisateurs dans le dialogue avec
les picadors.
2. Le respect du
règlement quant à la mise en suerte, 2 piques obligatoires pour tous les toros
et tous les novillos. La distance entre les 2 lignes séparant le toro du cheval
fut remise aux normes. Le prix au meilleur picador de la féria a permis de voir
des hommes mettre en valeur le cheval et le toro mais aussi de réaliser des
suerte de varas de qualité, même si on regrette que le nombre ne fût pas
majoritaire. La mise en place d’une commission pique qui a dialogué avec les
cavaliers avant chaque course et tous les matins pour présenter les changements
opérés cette année sur le premier tercio, surprenant certains, rassurant
d’autres. Cette commission a aussi préparé les petits mots de présentation au
public sur les programmes journaliers distribués avant chaque course dans les
arènes, demandé l’affichage des changements de toros au patio et dans les arènes. N’oublions pas la présence
systématique du président de la course au patio des caballos avant chaque paseo
afin de bien présenter le règlement instauré
sur les piques et de montrer sa volonté de bien faire respecter le
règlement.
3. L’arrivée des
peñas dans la commission taurine a permis de créer une véritable identité
montoise, une concertation et une compréhension les uns envers les autres, car
les attentes des uns ne sont pas forcément celles des autres sur la vision
d’une corrida.
4. La communication
est très importante et permet de mieux apprécier les personnalités de chacun et
la motivation à faire avancer les choses.
5. Cette année je ne
blâmerai pas Oscar Chopera sur les résultats de
6. Ce dont je suis
aussi sûr c’est que la commission dans son ensemble doit assumer les résultats
de
Quelles attentes pour
Surtout
ne rien changer concernant les dispositions prises envers les piques ainsi que
les nouveautés sur les affichages et les publications, nous avons fait des
choix pertinents qui seront peut être à l’origine d’une nouvelle identité
montoise.
En parlant d’identité je crois que Mont de Marsan est
à un tournant dans sa tauromachie, il me paraît intéressant de donner une image
plus torista avec des courses sérieuses, sans avoir des noms mais des hommes
qui voudront se donner à fond pour gagner un nouveau contrat et même se faire
connaître du mundillo français. A Mont de Marsan le public aime bien voir une
lutte entre la bête et l’homme, tout le monde se souvient de cette rencontre de
Joselito avec le Cuadri, elle n’aurait pas du avoir lieu car les hommes de main
ne voulait pas de cette course mais voilà il l’a fait et nous en sommes ravis.
Les gradins réagissent dès qu’ils sentent que le toréro « se la
joue » et il sera comblé de voir un Curro Diaz, un Padilla, un Cordobes se
donner à fond devant un vrai toro .Bien sûr que nous devons conserver l’état
d’esprit de la novillada comme une rencontre sérieuse et éduquer le public
jeune en proposant plus de novilladas de promotion, moins longues mais
nombreuses afin de ramener des jeunes au arènes, cela ne coûte pas cher et ça
peut rapporter gros pour l’avenir de la corrida à Mont de Marsan.
Les toros bien sûr comment ne pas en parler,
continuons à rechercher des élevages vrais pas pour vedettes, ceux qui ont
encore envie de démontrer que l’on peut encore combattre des toros qui endurent
la pique et qui conserve la race pour « permettre ».
Aurons nous l’audace d’imposer dès le mois de novembre
le nom des élevages choisis et de dire aux toréros c’est ça ou rien.
D’autre part fait-on le bon choix ? En effet 5
corridas n’est-ce pas une de trop, surtout si l’on garde le cap 2 toristas et 3
toreristas ? Ne faudrait-il pas avancer des courses au samedi, dimanche
matin et dimanche après-midi pour avoir plus de monde sur le week-end car les
gens n’ont plus des portes-monnaies extensibles ? Pourquoi ne pas faire
plus de novilladas de promotion en matinée pour amener plus de jeunes aux
arènes ?
(…)
Pascal
LAGUIAN.
Eh
bien nous l’avons, « notre » Grenelle de l’environnement !
Enfin, je ne sais pas pour ce qui vous concerne, mais moi, je n’avais rien
demandé … et puis il faut expliquer cette expression à tous ceux pour qui les
événements de mai 1968 se situent quelque part entre le Moyen-Âge et le règne
mitterrandien. Toujours est-il que nous l’avons et que, en champions du monde
des tirs groupés et des donneurs de leçons au monde entier, « nous »
y avons mis au programme : le remplacement des énergies fossiles,
l’émission des gaz à effet de serre, le niveau d’intensification de l’agriculture,
les cultures OGM, la construction des autoroutes et des lignes de TGV (j’en
oublie certainement) et, pour couronner l’édifice, la condition animale et sa
cohorte traditionnelle : le gavage des palmipèdes,
« l’exploitation » des animaux à fourrure, les expérimentations des
laboratoires pharmaceutiques et cosmétiques et … bien sûr la tauromachie ;
et au milieu de tout cela, comme si cela ne suffisait pas, est arrivé en
grandes pompes l’ours des Pyrénées.
Que l’Etat prenne l’initiative d’organiser un grand
débat de fond sur les questions cruciales pour notre avenir à tous que sont la
raréfaction des ressources naturelles et le réchauffement climatique, c’est normal et là, au moins, il
est dans son rôle. Mais j’avoue avoir du mal à comprendre ce que viennent faire
là dedans le sort des ours slovènes (même pas polaires !), ainsi que celui
des taureaux et des coqs de combat, d’autant plus que ces différents
« thèmes » sont mis au même niveau, sans aucune hiérarchisation, dans
les gros titres de la presse ou des journaux télévisés.
Si vous le permettez, réglons rapidement le sort de
l’ours : qu’on lui offre un cours d’Occitan à son arrivée de Slovénie,
avant de la lâcher dans cette nature ô combien hostile que constitue la
montagne pyrénéenne ; cela lui permettra de lire la signalisation routière
et de ne pas se jeter sous une voiture, et n’en parlons plus.
En revanche, il est vrai que le cas de la tauromachie
mérite toute l’attention d’une communauté de sommités, d’experts et de faiseurs
de recommandations de tout poil. En effet :
· elle concerne 50 à 60 communes de France (sur
36 000), et ce à raison de 3 à 10 jours par an ;
· quand, dans une feria même modeste, il y a 10 000
à 20 000 personnes dans la ville et au minimum 3 000 dans les arènes,
il se trouve un groupe important et représentatif d’au moins 10, parfois 20
militants « antis » pour cracher, au propre et au figuré, sur une
partie des premiers ;
· elle peut inciter, en particulier les plus jeunes, à
adopter un comportement violent : il est bien connu que le nombre de bagarres
et échauffourées à la sortie des arènes connaît une croissance
exponentielle ; c’est pour cela que, dans sa sagesse, le Conseil Supérieur
de l’Audiovisuel a demandé aux chaînes régionales diffusant des émissions
taurines d’apposer sur l’écran la mention « Déconseillé aux moins de 10
ans ».
Sur
ce sujet des risques de dérèglements psychiques chez les jeunes, je ferai les
deux remarques suivantes :
· d’abord un lieu commun : en admettant que la
tauromachie puisse être assimilée à une situation de violence, j’aimerais
savoir quel pourcentage elle représente dans l’ensemble des cas de violence
auxquels sont exposés aujourd’hui la plupart des enfants ;
· ensuite, et sans parler seulement des situations
violentes, je me demande quel sera l’effet à long terme sur le fonctionnement
du cerveau de la succession effrénée d’images et de sons se rapportant à des
thèmes ou des idées n’ayant aucun lien entre eux : je pense ente autres à
la publicité télévisée, aux mini journaux condensés du genre « Vous saurez
tout ce qu’il faut savoir en 5 minutes », au montage de nombreux films et
à leurs bandes-annonces.
Alors,
face à ceux qui s’attaquent à la corrida et exigent (radicalement) sa
suppression, il me semble urgent, avant de céder à leurs ukases, d’essayer de
savoir ce qui peut se passer dans la tête de cette fraction de l’humanité qui a
la conviction intime que Dieu -ou l’instance supérieure que vous voudrez- les a
mis sur terre pour améliorer contre vents et marées le sort de leurs
« congénères » hommes ou animaux (et demain végétaux ?) dans le
sens qu’ils ont eux-mêmes élu comme étant le bon et le seul.
Bernard DESVIGNES.
« Elle est interminable cette série de
slows », pense Sophie. « Elle est interminable cette série de
passes », doit penser le toro.
Et moi, je suis la copine qui garde le sac et je me
dis : « Conclus. Qu’on en finisse ! ». Mais non, c’est reparti de plus belle.
« Et vas-y que je te colle », pense le toro
Sophie, alors que le torero Guy a entamé une série de passes jésulinesques qui
réveille des spectateurs qui n’avaient pas encore engagé la conversation avec
leurs voisins. Et maintenant, l’estocade, décide le torero Guy. Mais
c’est long. Un avis sonne. Le toro s’effondre de lassitude.
Et le même scénario se répétera six fois.
Et
le pire, c’est que cette tendance à faire long
sévit dans tous les domaines. Des films ou pièces de
théâtre durent plus de
trois heures, les livres ont souvent plus de six cents pages. Un jour,
j’ai entendu un éminent diplômé de
sociopsychoprisedetêtologie (moi aussi, je sais faire long)
expliquer cette
tendance par le fait que l’on vit de plus en plus vieux. Ca
promet.
A l’avenir, nous irons aux corridas avec le repas du
soir et à la fin de la course, on allumera un feu de bois pour assister à la
tertulia ou faire des grillades. Et pourtant les faenas qui sont restées dans ma
mémoire étaient brèves. Je me souviens notamment d’une faena der Rincon au
début des années 90 où il domina un toro vicois, qui était tout sauf un
artiste, en une douzaine de passes. Mais y a-t-il aujourd’hui un lidiador capable d’en
faire autant ?
Et le torero n’aligne-t-il pas des passes pour cacher
ses limites, tout comme l’écrivain tente de faire oublier la pauvreté de ses
idées derrière un verbiage prétentieux ? Et oui, jeunes gens, noircir du papier, ce n’est pas
être écrivain, et faire des passes, ce n’est pas être torero.
PEPA.